Le point sur les marchés financiers décembre 2024

Vendredi 13 décembre 2024

Marchés Financiers

Le mois de novembre 2024 a été marqué par l’élection de Donald Trump aux États-Unis, une détérioration des perspectives économiques en Europe et des défis croissants pour les pays émergents en particulier la Chine. Sur les marchés financiers, le dollar s’est renforcé, tandis que le pétrole est resté stable  malgré une forte volatilité. L’or a reculé de 3,7 %. Par ailleurs, les thématiques liées à l’intelligence artificielle continuent d’être des moteurs de performance, bien qu’un certain attentisme se soit installé depuis l’élection américaine. Les investisseurs s’inquiètent des répercussions des tensions commerciales à venir sur l’inflation et la politique monétaire de la Fed.

Zone Euro : 

Les perspectives s’assombrissent pour l’économie européenne avec un retournement des indicateurs avancés en novembre. L’indice PMI Composite1 est passé sous la barre des 50 à 48,1, anticipant une contraction de l’activité à venir. Les incertitudes politiques en Allemagne et en France détériorent les perspectives, tandis que les tensions commerciales avec la Chine et les États-Unis fragilisent encore davantage les exportations. Pékin a suspendu ses investissements dans plusieurs pays européens et concurrence un secteur automobile déjà sous pression. En Allemagne, la récession persiste avec une contraction du PIB de -0,3 % au troisième trimestre en variation annuelle. Les secteurs industriels, historiquement des piliers de la croissance allemande, subissent la concurrence chinoise et des coûts énergétiques élevés, entrainant des suppressions de postes dans plusieurs entreprises emblématiques. Sur le plan politique, le limogeage du ministre des Finances par Olaf Scholz marque la fin de la coalition en place. Un vote de confiance est prévu le 16 décembre, suivi de de nouvelles élections en mars 2025. Ces élections pourraient débloquer la paralysie politique et voir la formation d’un nouveau gouvernement plus à même de s’attaquer aux problèmes structurels et cycliques auxquels l’économie allemande est confrontée. Un assouplissement du frein à l’endettement et une augmentation des investissements seraient très positifs pour le pays et l’ensemble de la zone Euro.
En France, le point d’orgue a été la motion de censure adoptée contre le gouvernement de Michel Barnier qui augmente l’incertitude tant qu’un nouveau gouvernement n’est pas nommé et qu’un budget n’est pas adopté pour 2025. L’économie subit également l’essoufflement de l’effet positif des Jeux Olympiques tandis que le secteur du luxe subit une baisse de la demande chinoise, affectant les géants de l’économie française.

Etats-Unis : 

Le mois a été dominé par la victoire sans appel des Républicains, qui présage des politiques protectionnistes et de soutien aux entreprises (baisse de l’imposition et déréglementation). Parmi les mesures phares envisagées figurent la hausse des droits de douane allant jusqu’à +60 % sur les importations chinoises et +10 % sur les produits européens. De plus, le futur Président a surpris les marchés en menaçant d’augmenter les tarifs douaniers sur les produits mexicains et canadiens de +25 %. Ces mesures risquent de raviver l’inflation à court terme mais l’économie américaine est restée résiliente. Les chiffres de l’emploi pour novembre révèlent une stabilisation des inscriptions hebdomadaires au chômage sur des niveaux particulièrement faibles. Ces résultats reflètent un marché du travail solide. Le taux de chômage demeure ainsi stable à 4,1 % en novembre, mais les tensions sur le marché du travail risquent de réapparaitre au vu des potentielles mesures anti-immigration. L’indice S&P PMI2  de novembre est sorti au-dessus des attentes sur les services à 57 (contre 55,2 attendu) tandis  que le PMI manufacturier  reste stable et en contraction à 48,8. Les craintes de récession semblent s’éloigner et un « soft-landing3 » paraît de plus en plus probable. 

Chine : 

En Chine, les PMI montrent une poursuite du redressement de l’activité dans le secteur manufacturier en novembre. La guerre commerciale s’intensifie après l’annonce de Pékin de mesures de représailles après les nouvelles restrictions commerciales prises par les Etats-Unis. Ces mesures de représailles prennent effet début décembre et portent sur des matériaux stratégiques (comme le gallium, le germanium, l’antimoine, ou encore certains produits à base de graphite) - utilisés pour la production de semi-conducteurs ou de batteries. Selon le US Geological Survey, la Chine bénéficie d’une position dominante sur la production de ces matériaux  (98 % de l’offre mondiale de gallium, 60 % pour le germanium).

RETOUR SUR LES PRINCIPALES CLASSES D’ACTIFS

Banques Centrales :

La situation internationale en constante évolution ne devrait pas changer la stratégie des Banques Centrales qui reste dépendante de l’économie.
A l’occasion de sa dernière réunion de politique monétaire de l’année, la BCE a réduit ses taux directeurs de -0,25 % (à 3 % pour le taux de dépôt) pour la 4e fois en 2024 et pour la 3e fois consécutive. Christine Lagarde a justifié cette évolution en expliquant que les risques inflationnistes étaient dorénavant plus équilibrés. Elle s’est ainsi gardée de s’engager sur la suite de l’assouplissement monétaire, en rappelant une nouvelle fois que les décisions continueraient d’être prises « réunion après réunion » selon les données économiques disponibles. Elle a d’abord reconnu que les perspectives de croissance étaient dégradées, mais elle a ensuite insisté sur la prudence concernant l’inflation domestique qui reste élevée, notamment dans le secteur des services. Au final son discours s’est avéré moins accommodant par rapport aux attentes du marché.
La FED de son côté, peut s’appuyer sur un marché du travail qui se détend progressivement pour justifier une nouvelle baisse des taux directeurs attendue la semaine prochaine. Néanmoins, le programme de la future administration Trump pourrait limiter la marge de manœuvre de la Fed au premier trimestre 2025. Jerome Powell, a d’ailleurs tempéré ces attentes en déclarant que "l'économie ne donne aucun signal indiquant que nous devons nous dépêcher de baisser les taux". Le marché a d’ailleurs réévalué la trajectoire des Fed Funds en lien avec une inflation persistante, une économie plus résiliente et l’impact inflationniste potentiel des mesures économiques souhaitées par Trump. Le sentiment de marché intègre donc plus de prudence à attendre dans la conduite de la politique monétaire l’année prochaine pour mieux prendre en compte les mesures prises par le nouveau gouvernement.

Marchés obligataires :

Les marchés obligataires souverains ont enregistré une forte volatilité en novembre. Aux États-Unis, les rendements des emprunts d’Etat à 10 ans ont atteint 4,50 %, leur plus haut niveau depuis trois mois, avant de redescendre plus récemment à 4,17 %, détente observée à la faveur de la nomination au poste de secrétaire du Trésor de Scott Bessent, personnalité jugée modérée. La réélection de Donald Trump a renforcé les attentes d’un creusement du déficit budgétaire et augmenté les risques d’inflation, réduisant les espoirs  de nouvelles baisses rapides des taux directeurs de la FED. Les rendements souverains plus courts à 2 ans sont ainsi restés autour de 4,15 %. En zone euro, les rendements allemands à 10 ans ont aussi nettement reculé au cours du dernier  mois, évoluant de 2,40 % à 2,10 % au plus bas. Cependant, le discours de la BCE du 12 décembre a tempéré les anticipations des investisseurs qui espéraient  des baisses de taux directeurs rapides, contribuant ainsi à une remontée des rendements obligataires européens (+ 8 points de base sur le Bund4  à 10 ans). Sur la même période, le taux à 2 ans a également fortement diminué (-33 points de base) pour s’inscrire dorénavant autour de 2 %. Les obligations françaises ont fluctué  sous l’effet des annonces politiques atteignant un pic de 3,20 % avant de redescendre à 2,95 % aujourd’hui. L’écart entre les rendements des obligations françaises et allemandes à 10 ans s’est accru jusqu’à +0,81 % (désormais +10 points de base  au-dessus de l’Espagne) intégrant une prime de risque spécifique, et reflétant les doutes quant à la capacité de la France à redresser ses comptes publics. A l’inverse, l’écart entre les rendements italiens et allemands s’est resserré, témoignant de la part des investisseurs d’un retour d’appétit pour le risque et le rendement. Enfin, notons que le taux à 10 ans chinois a atteint  un plus bas historique à 1,975 %, soulignant un courant acheteur des investisseurs institutionnels et des banques, à la recherche d’un actif de « rendement » face aux futures baisses de taux attendues de la Banque centrale chinoise.

Le marché du crédit européen a connu une année record en termes d'entrées de capitaux, dans un contexte d'offre nette modérée et de fondamentaux résilients, ce qui a contribué à la bonne performance de cette classe d’actif. Toutefois, sur la période récente, les émetteurs privés français ont légèrement sous-performé, plus particulièrement ceux du secteur bancaire. La liquidité sur le marché secondaire se réduit à l’approche de la fin d’année, favorisant la volatilité. Sur le marché des émetteurs de bonne qualité (catégorie Investment Grade), la vague républicaine aux Etats-Unis a d'abord entraîné un resserrement des spreads de crédit avant de les voir s’écarter de nouveau à la fin du mois. 

Notre gestion :
Nos portefeuilles affichent toujours une sensibilité aux taux d’intérêt légèrement supérieure à leur indice de référence. D’un point de vue géographique nous avons maintenu notre surpondération sur l’Italie, l’Espagne et le Portugal au détriment de la France dont les perspectives budgétaires demeurent préoccupantes.  Cependant nous restons flexibles dans notre positionnement sur la duration, afin de tirer parti  de la volatilité des marchés qui permet des prises de positions plus tactiques. Sur le marché du crédit, dans un contexte  de  recherche de rendement, nous maintenons une surpondération sur les émetteurs européens de bonne notation (catégorie Investment Grade). Ces investissements sur les obligations privées nécessitent néanmoins d’être sélectif sur la qualité et la liquidité des émetteurs,  afin de bénéficier du portage attractif de cette classe d’actif. 

Marchés Actions :

Au cours de novembre et en ce début décembre, l’élection de Donald Trump et ses mesures favorables à la croissance, telle la dérégulation de l’économie et les baisses d’impôts, ont propulsé les marchés américains vers de nouveaux records historiques, élargissant encore plus la divergence de performances avec la plupart des autres places boursières internationales. Récemment, on peut noter un rebond relatif des marchés européens qui sont portés par des rachats à bon compte. Au niveau sectoriel, la volatilité s’est accrue au gré des nominations du futur gouvernement et des déclarations faites par Donald Trump sur les potentiels tarifs douaniers qui seront implémentés après son investiture en janvier. Celui-ci a notamment proposé d'imposer des droits de douane de 25 % sur toutes les importations en provenance du Canada et du Mexique. Cela a suscité des inquiétudes quant à l'escalade des guerres commerciales qui pourraient déstabiliser les marchés, en particulier pour les entreprises qui dépendent de chaînes d'approvisionnement transfrontalières comme l’automobile ou l’électronique. Ces secteurs qui utilisent ces pays comme plateforme de production pourraient voir leurs coûts de production augmenter. Le secteur pharmaceutique a, quant à lui, été impacté par la nomination à la tête du ministère américain de la Santé de Robert F. Kennedy Jr qui, en autres, est un sceptique déclaré face à la vaccination. A contrario, la nomination de Scott Bessent au poste de secrétaire au Trésor américain a rassuré les marchés car il est considéré comme un homme pragmatique ayant une approche réglementaire plus clémente pour stimuler la croissance.
Dans ce contexte, au 10 décembre, les marchés développés progressent depuis le début d’année de +20,43 % selon l’indice actions monde MSCI World (en dollar). L’indice large des actions américaines S&P500 affiche une performance de +26,52 % (en dollar), celui des actions européennes STOXX 600 de +8,25 % (en euro) et celui des actions japonaises TOPIX de +15,85 % (en yen). La performance des marchés émergents reflétée par l’indice MSCI Emerging Markets est quant à elle de +8,59 % (en dollar) depuis le début d’année.

Notre gestion :
Dans nos portefeuilles, nous continuons à avoir une vision positive sur l’évolution des marchés actions et nous avons maintenu notre surpondération. Nous commençons à avoir une vue plus constructive sur la zone Euro qui pourrait rattraper une partie du retard de performance accumulé par rapport aux marchés américains. Au niveau sectoriel, nous avons diminué notre surpondération sur le secteur bancaire en prenant   quelques bénéfices. Malgré des fondamentaux solides et une valorisation attractive, celui-ci pourrait souffrir de l’incertitude politique en zone Euro. A contrario, après avoir sous-pondéré le secteur du luxe depuis plusieurs mois face au ralentissement de la croissance et à la baisse des marges dans le secteur , nous avons décidé d’augmenter nos positions. Le secteur présente dorénavant des valorisations plus raisonnables avec un niveau de croissance qui devrait s’améliorer en étant notamment tiré par l’effet richesse aux Etats-Unis (salaires réels bien orientés, bonne tenue des prix du marché immobilier et évolution positive du marché boursier). La consommation des ménages chinois qui montre quelques signes d’amélioration et qui pourrait s’accélérer avec de nouvelles mesures de relance est un autre point qui serait fortement positif. Au niveau sélection de titres nous avons aussi effectué de nombreux ajustements dans les secteurs de l’industrie et des semi-conducteurs. Nous sommes aussi revenus sur des dossiers en forte sous-performance depuis le début d’année suite à  une pression conjoncturelle mais dont les fondamentaux moyen long terme ne sont pas remis en cause. Ces titres offrent un fort potentiel de rattrapage et devraient profiter d’un repositionnement des investisseurs en vue de 2025. 

1 PMI, pour Purchasing Managers Index, est un terme générique pour désigner des indices établis à partir d’enquêtes mensuelles auprès des directeurs d’achat des grandes entreprises des principales économies mondiales. Le PMI composite combine les données des indices PMI manufacturier et des services.
2 Les indices PMI sont établis à partir d’enquêtes mensuelles réalisées par S&P Global.
3 Le soft landing (ou atterrissage en douceur) consiste pour les autorités monétaires à modérer suffisamment le taux de croissance de l'économie pour éviter la surchauffe et l'excès d'inflation, tout en maintenant cette croissance à un niveau suffisant pour éviter la récession.
4 Le Bund est l'obligation d'État allemande (obligation du Trésor) qui sert de référence sur le marché obligataire en Europe.

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